Le vallon des lucioles

Isla Morley

Seuil

  • Conseillé par
    25 février 2021

    En 1937, pour promouvoir le politique du New Deal du président Roosevelt, la Farm Security Administration envoie des binômes photographe/journaliste aux quatre coins des États-Unis. Il s’agit de montrer l’Amérique profonde dans toute sa misère afin d’inciter les donateurs à délier les cordons de leurs bourses. Pour Clay Havens, le photographe détenteur d’un Prix Pulitzer et Ulys Massey, le journaliste, ce programme est une aubaine pour se refaire une santé financière et, pourquoi pas, trouver LE sujet qui les rendra célèbres. Envoyés à Chance, Kentucky, petit village des Appalaches, les deux hommes ont vent d’une activité très secrète pratiquée par la population locale : la chasse aux ratons bleus. Plus qu’intéressés, Havens et Massey décident de creuser l’affaire et se rendent dans le vallon des lucioles. C’est là que vivent les Buford, une famille stigmatisée, ostracisée, persécutée car certains de leurs membres naissent avec la peau bleue. Tandis que Massey jubile à l’idée de tenir le scoop de sa vie, Havens rechigne à exposer la vie de cette famille dans un journal. Il faut dire qu’il est irrémédiablement tombé sous le charme de Jubilee, la fille bleue des Buford.

    Même si c’est, a priori, très surprenant, Le Vallon des lucioles est un roman basé sur une histoire vraie, celle de la famille Fugate dont certains membres étaient atteints d’une maladie du sang, la méthémoglobinémie qui donne à la peau une couleur bleutée.
    Evidemment, ce qui est différent effraie, ce qui effraie provoque la défiance, voire la haine. Les Fugate vivaient isolés et se mariaient entre eux, continuant ainsi de transmettre le gène défectueux.
    Sous la plume d’Isla Morey, les Fugate deviennent les Buford, une famille que "ceux de la bonne couleur" ont relégué au fin fond d’un vallon. Ils portent malheur, ils sont enfants du diable et on peut les insulter, les pourchasser, les torturer, les tuer même, sans que la police ou la justice lèvent le petit doigt. Le livre a le mérite de nous faire découvrir cette famille et leur étrange particularité génétique. Mais l’action est très lente à s’installer, une grosse première partie frôle l’ennuyeux. Si l’on comprend bien qu’ils sont victimes de la haine et du racisme des blancs, l’accent est surtout mis sur la romance qui naît entre Jubilee et le photographe, Clay Havens. Et cette romance, mièvre au possible, est en plus desservie par une écriture sans intérêt. Traduction approximative ou auteure peu inspirée ? Un peu des deux sans doute. Certaines phrases doivent être lues et relues pour être comprises et les parties consacrées à Jubilee sont navrantes. La jeune fille affiche vingt-trois printemps mais par moment on a l’impression qu’elle en a douze tant ses paroles sont niaises.
    Bref, une fois la première partie passée, la narration prend de l’ampleur et enfin on rencontre un peu d’action. Mais c’est presque trop tard…
    Avec ces drames, ses amours impossibles et ses bons sentiments, Le Vallon des lucioles aborde des thèmes multiples comme la résilience, la rédemption, l’étique journalistique et bien sûr les préjugés, le racisme et la violence. Le tout manque de nuances mais on retiendra de sublimes descriptions de la faune et la flore des Appalaches, la découverte des Bleus et une fin inattendue. À lire pour découvrir les Buford.