La vague qui vient

"J'étais arrivé sur l'île quelques mois plus tôt à la suite d'un naufrage, à croire qu'il n'y a pas d'autres façons d'aborder une île (...) Le naufrage était celui de mes ambitions que j'avais été contraint d'ajuster à la réalité du monde" confie le narrateur, auteur de bandes-dessinées en mal de succès. "Sans réserves financières et sans perspectives d'en constituer", ce dernier décide de s'installer sur l'île où il possède une petite maison depuis quelques années.
l'Ile, 15km de long et 4 de large est séparée du continent par une langue de mer de presque 6 km. Il y fait très chaud dès le printemps jusqu'au milieu de l'automne, elle possède des eaux cristallines et est occupée par trois catégories d'habitants : les Iliens, les secondaires et les touristes. Le Village, composé de quelques centaines de maisons blanches est le lieu vivant de l'île, tandis que le Hameau, au centre, ne compte que quelques maisons. Les Iliens,ou natifs, ont une cosmogonie assez simple : il y a le Continent, l'Océan, l'Ile et le Village. Sur l'Ile, les natifs aiment baptiser les gens d'un surnom. Notre dessinateur devient donc vite l'Artiste.
Et c'est en raison de son talent que le maire de l'Ile va rapidement venir le débusquer de sa retraite mal chauffée (la chaudière ne marche pas et pas de plombier à l'horizon). Le conseil municipal a décidé, sous l'influence du maire, de réaménager la salle des fêtes en pensant grand et comme la culture ça donne tout de suite une autre dimension (toujours d'après le maire), voilà donc notre Artiste embauché pour redécorer entièrement la salle des fêtes selon ses désirs et ses envies.
Muni de son carnet de croquis, l'Artiste observe et va à la rencontre des habitants en tâchant de se faire adopter, ce qui n'est pas choses facile ! Sur l'Ile, si les légendes se partagent, les secrets, eux, restent bien gardés. Aux côtés de cet anti-héros assumé, le lecture s'amuse vraiment, il rit même ! Parce que Daniel Fohr réussit parfaitement à rendre le comique de situation, que ses personnages sont truculents et que le ton employé pour nous raconter cette île fait mouche immédiatement. Quel plaisir de lecture !

Un dessinateur de BD en bout de course décide de quitter le continent pour rejoindre L'Île, où il possède une maison de vacances. De vacances, il n'en est pas tellement question vu sa situation et la période où il débarque sur l'île. Novembre, son humidité et l'absence de confort d'une maison plutôt équipée pour l'été (voire – soyons fou, de mi-saison). Cerise sur le gâteau, la chaudière est en rade. Peu importe, notre bonhomme n'est plus à ça près. Une surprise pouvant en cacher une autre, il reçoit très rapidement la visite du maire venu lui faire une proposition colossale, car notre élu "think big" (sic) : à savoir doter la salle des fêtes d'une fresque peinte en hommage à l'Ile, son histoire et blabla. Bref, replacer cette salle au centre de toutes les attentions "worldwide" si possible. Comme une sorte d'œuvre monumentale, mais raisonnable et surtout respectueuse des locaux et de son histoire. Il souhaite donc lui confier les rênes de ce chantier au grand dam de l'unique retraitée peintre du coin qui se serait bien vue barbouillé de ses jolies fleurs ladite salle.

Voilà donc le début de ce roman savoureux, et le mot est faible, tant la drôlerie et l'esprit irriguent ces pages. Les descriptions des personnages y participent grandement, tout comme le regard un brin moqueur du narrateur (qui ne se loupe pas non plus). On notera la figure tutélaire du maire et celle magistrale de l'actrice déchue et non dénuée de panache. Puis celle du Voisin, personnage universel s'il en est. Bref, un roman réjouissant à lire fissa !