« L’homme est un flic jusqu’aux bouts des ongles. Les bottes ancrées dans la terre, peu enclin à la mélancolie » écrit Raphaël Malkin à propos du Lieutenant Versiga. Parti pour lui consacrer un article, l’auteur fasciné par la vie ô combien romanesque du personnage a finalement décidé d’écrire un livre. Darren Versiga est flic à Pascagoula, Mississippi, un flic qui « ne lâche pas l’affaire » comme on dit. Et cette affaire c’est un "cold-case" qui s’est déroulé le 27 décembre 1977 dans le bayou où le corps d’une jeune femme noire a été retrouvé mais jamais identifié. Le lieutenant rouvre l’enquête de cette « Jane Doe » qui le mène sur la piste de Samuel Little, l'un des plus terribles "serial-killer" du pays.

"Le Grand Escroc", "The Confidence-Man" en anglais, est le dernier roman publié par Herman Melville. Un roman virtuose mais très original et certainement pas le plus facile à lire. Sur les quais de la ville de Saint-Louis, un homme monte à bord du bateau à vapeur "Fidèle", microcosme métaphorique de notre monde « régi par les échanges marchands et les tractations entre individus ». On pense évidemment à l’expression « se faire mener en bateau » lorsque l’on observe la suite de tableaux qui composent le roman au sein desquels un imposteur se joue des autres et se fait parfois avoir. Au lecteur d’accepter de jouer au détective et de se laisser porter sur les eaux du Mississippi pour découvrir (peut-être) pourquoi des inconnus s’accordent leur confiance.

Joséphine Linc. Steelson « négresse depuis presque cent ans » l’avait prophétisé : « nous allons tout perdre. Nous allons nous accrocher à nos pauvres vies comme des insectes à la branche mais nous serons dans la vérité nue du monde. » Quand l’ouragan Katrina se sera abattu sur la Nouvelle-Orléans, il y aura ceux qui pourront fuir et ceux qui ne pourront pas. Laurent Gaudé ne le nomme jamais mais il est là le cyclone destructeur qui nous entraîne dans un récit apocalyptique, il est là l’écrivain qui embarque son lecteur dans un même souffle pour offrir un récit puissant porté par des personnages incarnés, humains car l’ouragan ne se déchaîne pas qu’à l’extérieur, il est aussi intérieur… C’est à la fois beau et terrible.

Premier roman de Margaret Wilkerson Sexton, "Un soupçon de liberté" se déroule dans une famille noire américaine à la Nouvelle-Orléans. En nous racontant le destin de trois générations, Margaret Wilkerson Sexton brosse un portrait édifiant de la société américaine au fil des décennies. Des années 1940, avec Evelyn, jeune femme privilégiée dont le père fut le premier médecin noir de la Nouvelle-Orléans, aux années 2000 avec son petit-fils T.C. qui sort de prison alors que la ville vient d’être ravagée par l’ouragan Katrina, en passant par les années 80 avec Jackie dans un contexte économique difficile, le lecteur assiste impuissant à la décadence d’une famille afro-américaine de classe moyenne. Une fresque familiale poignante.

Eddy L. Harris revient s'installer à Harlem après un long voyage sur le Mississippi en canoë, qui a inspiré son roman "Mississippi Solo". L’auteur nous raconte ici son retour dans les rues de son enfance, un quartier qui lui permet de questionner ses origines et sa condition en tant qu’homme noir. À travers des portraits de locaux et de son propre père, l’auteur nous dépeint d'une plume incisive une Amérique qui tente de rester à la surface. Une Amérique toujours fracturée par le racisme, les drogues, la violence et les armes. Un essai percutant, témoin d’une réalité actuelle : Harlem, ce quartier limitrophe des beaux quartiers d’une ville lumière et qui continue d’être agressé par les ombres de l’intolérance. Eddy L. Harris se fait tout de même le porte-parole d’un espoir renaissant en déployant un beau manifeste à l’âme humaine.