Mirontaine sta leggendo

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Professeure des écoles par correspondance et lectrice passionnée autant en littérature de jeunesse qu’en littérature générale.

roman

Stock

20,00
5 juillet 2011

À la fin des années 1970, Sami, un jeune garçon, disparaît au centre de la campagne algéroise. Pour ne jamais l’oublier, Alya, son amie d’enfance, écrit chaque jour son histoire, leur histoire, réinventant le passé, fixant le présent, temps de l’attente et de l'imagination.

« C’est arrivé dans l’attente d’un amour qui ne reviendrait pas. C’est arrivé dans l’espoir de devenir une personne qui trouverait sa place dans le monde. C’est arrivé tous les soirs, quand je regardais le soleil tomber derrière les plaines de la Mitidja. Chaque fois je me disais qu’il emportait une part de moi-même. Tout tourne, tout s’efface et tout recommence et je ne sais pas si l’on retrouve un jour ce que l’on a perdu ».

Sauvage est le récit de cette année-là. Dans "Sauvage", son 13ème roman paru aux éditions Stock, Nina Bouraoui nous raconte les liens parfois indéfectibles entre elle et le personnage principal, joliment nommée Alya.

Il est question d'amour, d'un amour ambigüe voilé sous un désir masqué entre Alya et Sami. Alya, la jeune fille sauvage, nous livre ses questionnements, une recherche omniprésente d'elle-même, sa quête spirituelle. La nature est voluptueuse dans ce roman notamment lors de la visite de la grotte. Expérience unique pour Sami qui rappelle à Alya la possibilité de mourir après avoir vu ce don de la nature.

J'admire cette soif d'absolu chez cette jeune femme qui s'éveille à l'écriture, sous couvert de recherches métaphysiques à cet âge « sauvage » de tous les possibles.

Les phrases de Nina Bouraoui sont comme des vagues violentes , elles brassent des idées sombres pour honorer un merveilleux retour aux sources.

Livre lu grâce à la Librairie Dialogues de Brest dans le cadre de Dialogues croisés.

les variations Dolores

Stock

30,00
27 juin 2011

Darling River est une variation autour du personnage de Nabokov, Lolita.

Lo a treize ans et parcourt avec son père les routes à bord d'une vieille jaguar le long du Darling River. Le périple semble apocalyptique. Les décors sont vides, la terre aride et les forêts en feu.

Dolores, un autre personnage, est la vraie Dolores Haze de Nabokov. Sara Stridsberg imagine sa mort en Alaska, tandis qu'elle donne naissance à un enfant.

Autre personnage avec cette jeune chimpanzé dont un scientifique français tente de lui apprendre le dessin au Jardin des Plantes. Cette histoire est la source selon Nabokov de son roman Lolita.

Dernier personnage, avec cette femme énigmatique qui sillonne les autoroutes proches de la ville, serait-elle la mère que recherchent Lo et son père?

Le récit se veut amoral même si l'atmosphère est décrite avec beaucoup de légèreté. Ce roman offre une variation sur le thème de l'instinct maternel sous couvert de l'ambivalence entre les personnages.

Le regard est assez abrupte sur le monde de l'enfance et la décrépitude du genre humain. Le thème du sordide et du laid n'est pas vraiment ma tasse de thé mais je dois avouer que je me suis laissée charmer par cette plume poétique surprenante. Sara Stridsberg réussit à creuser au plus profond de l'âme humaine dans cette Amérique décadente. Un bon roman sur l'amour, le féminisme, la chair et les variations Dolorès. Dolores veut dire douleur. Selon Stridsberg, la femme serait condamnée à la douleur, celle d'enfanter, d'être fille, mère et amante. La femme apparaît comme un animal dépecé.

« La sage-femme passe le rasoir sans penser qu'entre les jambes de Dolorès toujours hâlées et gluantes et tremblantes et nues enfle une bulle de chewing-gum rose et que dans sa tête un parfum de fraises et de soleil et d'espérances explose. »

Roman surprenant qui me donne l'envie de découvrir "La faculté des rêves" paru en 2009.

Roman traduit du suédois par Jean-baptiste Coursaud, Stock, mai 2011.

Je remercie la Librairie Dialogues de Brest pour cet envoi.

2 mai 2011

(Café Bicerin, boisson piémontaise originaire de Turin, préparée à partir d'expresso, d'une pâte chocolatée chaude et de crème servis dans un verre.)

Un homme de soixante ans croise dans la vitre d'un bus sa mère. Le visage de sa mère est celui de sa trentaine. « Le possible est la limite mouvante de ce qu'on est disposé à admettre ». Il s'adresse à sa mère et évoque son enfance et son adolescence à Naples. La parole d'Erri de Luca est très touchante.

Il raconte des petits souvenirs de son enfance, bercée dans un quotidien initiatique et déréglé(le bégaiement du narrateur, les lapsus, les jouets qui se brisent). Il évoque les enfants battus à l'époque, puis ses joies auprès de Filomena, la domestique. Il n'a pas connu les violences physiques mais les remontrances verbales étaient son pain quotidien d'enfant bègue « Jevvveux pas des mots ».
"Entre mère et fils le progrès n'existe pas, la civilisation n'évolue pas : les mots seront toujours réduits et ne seront que des mots, rares, préservés. Ils ne remplacent rien, ni les coups, ni les caresses."
Récit d'une enfance napolitaine où la mémoire ne console pas.La ville de Naples est baignée d'une lumière blanche, elle semble dénudée et privée de ses atours baroques.
Pas ici, pas maintenant n'est pas une évocation nostalgique, mais un « livre abrupt et fier » sur le monde et l'enfance et les réminiscences des gestes tendres d'une mère.

(Première parution en français aux Editions Verdier en 1992 sous le titre Une fois, un jour)
Non ora, non qui, 1989
Traduit de l'italien par Danièle Valin

7,70
28 avril 2011

Le narrateur, Jean-Louis Fournier, a deux enfants handicapés. Tout au long de ce cours roman, primé en 2008 pour le Prix Femina et en 2010 pour le Prix des Lecteurs, il raconte cette réalité quotidienne avec ses deux fils.

A travers son regard de père, il écrit une longue lettre d'amour, sans véritable destinataire, puisque ceux pour qui cette lettre est écrite ne pourront jamais en apprécier la teneur. C'est une formidable leçon de vie, teintée d'un humour cocasse et caustique propre à Jean-Louis Fournier. Pas de mélodrame mais des phrases justes, incisives qui bousculent nos préjugés et touchent le lecteur. L'humour est corrosif mais nécessaire pour affronter la réalité d'un quotidien peu banal entre Mathieu et Thomas. « Où on va papa? », cette phrase est inlassablement répétée par Thomas, tandis que son frère Mathieu jette un ballon, seul lien créé entre ses parents et lui pour établir un contact. Réalité et vérité sont les deux maîtres mots de ce petit roman. Certes, l'espoir d'un bel avenir pour ces deux fils est vain, vivre une existence paisible devient difficile. Seul l'humour pourra embellir cette leçon de vie. Là où certains lecteurs soulignent la cruauté des propos de Jean-Louis Fournier, je ne relève que poésie et infinie tendresse pour Mathieu et Thomas.

22 avril 2011

Jenny est une bonne élève, une jeune fille passionnée par les livres. Elle a une vie équilibrée entre un papa enseignant à Polytechnique et une maman enseignante en lettres classiques. Tout semble aller pour le mieux, du moins en apparence. Le semblant d'équilibre périclite le jour où Jenny casse volontairement une canalisation de son lycée, active l'alarme incendie et une commande internet sur la carte de son père. Elle est orientée vers la psychologue scolaire puis vers un psychiatre. Comment va évoluer cette reine des mots? Jenny est la narratrice et au fil des pages, on prend connaissance de la tempête sous son crâne. Son psychiatre lui prescrira des ordonnances de lecture. Ces lectures qui vous emmènent sur des chemins de traverse, qui ne sont que le reflet de notre propre vie. Un père qui protège un vieil exemplaire du Petit Prince et révèle dans le cabinet du psy:

« C'est comme si j'avais porté un masque depuis trop longtemps. Je vais au travail, j'enseigne, je plaisante avec mes collègues, je bouge, j'agis...Mais je porte un masque. Cet homme que tout le monde voit, ce n'est pas moi, c'est quelqu'un d'autre. Je suis un acteur qui joue un rôle. Tout dans ma vie a l'air de fonctionner normalement, les gens autour de moi ne se rendent compte de rien... Pourtant, ce n'est pas moi, c'est quelqu'un d'autre qui me ressemble.

Seulement, sous un masque, au bout d'un moment, on commence à suffoquer. Alors j'ai décidé de l'arracher, pour respirer un peu mieux... »

Un très bon roman, même si les vicissitudes d'esprit de Jenny apportent quelques longueurs dans la narration, elles sont utiles pour mieux comprendre cette reine des mots. Un personnage très proche de ceux de Maud Lethiellieux qui apporte beaucoup de fraîcheur, d'humour et de légèreté.