Yv

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Je lis, je lis, je lis, depuis longtemps. De tout, mais essentiellement des romans. Pas très original, mais peu de lectures "médiatiques". Mon vrai plaisir est de découvrir des auteurs et/ou des éditeurs peu connus et qui valent le coup.

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7 mai 2015

Remarque liminaire, Arto Paasilinna a écrit ce roman en 1986, il n'est traduit en français (admirablement, comme toujours par Anne Colin du Terrail) que cette année. Il faudra donc que le lecteur fasse l'effort de se replonger dans ces années où le téléphone portable n'existait pas, ni Internet, où le mur de Berlin était encore debout (je précise, car après le Macabraguay, Viljo Surunen ira de l'autre côté du mur en Vachardoslavie), où moi-même je pensais à bien autre chose qu'à un journal de mes lectures (bon, je lisais déjà pas mal, mais j'entamais ma brève et médiocre carrière d'étudiant, j'avais d'autres occupations : sortir, étudier, sortir, me reposer parce que les sorties, ça fatigue, sortir parce que je m'étais bien reposé, étudier ? ah oui, tiens, une bonne idée... mes enfants, merci de ne pas me lire ou de croire que ce ne sont là que des sornettes destinées à mettre mon lectorat en appétit, parce que là, c'est pas pareil, c'est moi qui paie vos études...)

Bon, revenons donc à Surunen après cet avant-propos qui s'est un peu éloigné du sujet. La première partie, celle qui se déroule au Macabraguay est un peu longue, il aurait fallu tailler un peu dedans pour garder le rythme tout du long. La seconde partie, en Vachardoslavie, est plus courte, nettement plus dynamique. La différence entre ces deux parties donne un livre déséquilibré, j'aurais préféré deux parties équivalentes, un roman plus ramassé, plus court d'au moins une bonne soixantaine de pages. Il finit néanmoins sur la partie la plus rythmée, je reste donc sur une belle impression. Et puis, la plume légère et drôle d'Arto Paasilinna fait le reste, ses personnages sont toujours barrés, ils ont un gros grain, se mettent dans des situations abracadabrantesques comme dirait certain, sous couvert de la poésie d'Arthur Rimbaud. Surunen n'est pas un sur-homme ni un super héros, mais il réussira des exploits et subira des tortures qui me font encore frissonner, mais tout cela avec le sourire (le mien, parce que le sien sur le moment n'était pas vraiment sur ses lèvres). Sûr de son bon droit, il file et se moque des dangers. Au passage, Arto Paasilinna en profite pour mettre dans le même panier les dictatures installées et soutenues par les États-Unis à grand renfort de dollars et de soutien logistique et les dictatures soutenues, encouragées et souhaitées par l'URSS de l'époque. Les discours ne sont pas les mêmes, certains ne jurent que par le capitalisme, alors que les autres ne croient qu'au communisme, mais les résultats sont les mêmes : les dirigeants s'enrichissent, mettent en prison ou en camps les opposants ou les font tuer sous divers prétextes, et le peuple souffre.

Conclusion, bien qu'un peu long, ce roman d'Arto Paasilinna ancré dans une triste réalité, celle des dictatures, réjouira les lecteurs pas son sens de l'absurde, la folie douce de ses personnages. Un pari réussi que de faire rire ou sourire avec un thème a priori grave.

Jonathan Curiel

Fayard

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7 mai 2015

Très inégal ce roman à réserver tout de même au public visé, les trentenaires voire jeunes quarantenaires pour qui ces souvenirs ne sont pas trop lointains. Les débuts de chapitres peuvent être longs, les dialogues sont beaucoup plus vifs et intéressants, on y lit pas mal de réflexions drôles, décalées qui parfois font mouche et parfois font un peu "bonne blague à recaser". On sent que l'auteur en a sous le pied mais qu'il ne se libère pas totalement, ce qui fait que les bonnes intentions ne sont pas exploitées à fond. Ah, comme j'aurais aimé plus de délire et de décalage ! Certains passages sont très réussis, comme la visite du jeune couple à Ikea avec les parents de Claire, et le désintérêt de Paul qui demande à son beau-père "au crâne dégarni et au style élégant s'il souhaite (l)'accompagner quelques minutes dans la piscine à boules mais il ne répond pas, hélant son épouse comme pour se débarrasser de (lui)". (p.27), ou encore le séminaire avec une collègue très en forme.

Mes souvenirs de trentenaire jeune installé et jeune papa sont un peu anciens, je ne suis sans doute pas le lecteur visé par ce roman qui devrait convenir à la génération qui me suit, qui lui parle directement.

Éditions de L'Olivier

19,50
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7 mai 2015

Que dire ? Que dire ? Que je me suis ennuyé ? Certes non, enfin, un peu quand même. Que j'ai aimé ? Non plus. En fait, je suis passé au travers de ce roman sans qu'il s'imprime en moi. L'histoire d'Ajay ne m'a pas du tout touché, j'ai eu l'impression d'une vague connaissance qui me raconterait sa vie avec ses bonheurs et ses malheurs, sans que je compatisse ou que je me réjouisse. Imaginez la scène : je revois une vieille connaissance, on s'arrête prendre un verre dans un bar et, pendant qu'il me raconte sa vie, totalement absorbé par ce qu'il dit, mon esprit s'évade, je regarde au-dessus de mon interlocuteur -qui en l'occurrence est un monologueur (?)-, entend sa voix mais ne l'écoute plus, sans que lui ne s'en rende compte. Vous comprendrez dès lors que je n'ai pas d'avis sur ce roman. Alors pourquoi écrire un demi-billet dessus me questionnerez-vous ? Ben oui, pourquoi ? Juste pour faire mon intéressant, bien sûr..

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7 mai 2015

Agnès Bihl m'avait déjà bluffé avec son recueil de nouvelles, 36 heures de la vie d'une femme, elle récidive avec son premier roman. Quelques passages un peu longs, assez rares cependant, donc je les évacue très vite. Le reste, eh bien, il est excellent. Ce qui me ravit c'est le sens de la formule de l'auteure, je pourrais en citer un nombre incalculable, des sortes d'aphorismes, d'expressions détournées, de réparties cinglantes (par exemple un dialogue entre copines) :

"Pas futé, ton bonhomme.

- C'est même le roi des cons. Ne le sous-estime pas.

- Et sexuellement il est comment ?

- Parfait pour chronométrer la cuisson des pâtes." (p.37)

A chaque fois, sa phrase sonne juste, tombe dans le mille. C'est drôle, ironique, tendre, tragique, ... car elle joue de tous les registres. Si le livre est globalement positif et joyeux, certaines pages sont sérieuses et bien senties, comme celles qui concernent la maltraitance que subissent les personnes âgées dans certaines maisons de retraite, ou les violences faites aux femmes, le racisme, la surabondance de soi-disant informations dans les journaux télévisés ou radiophoniques. Ce qui est bien, c'est que le raciste mis à part, qui est vraiment un gros "Connard" (dixit Agnès Bihl), l'auteure n'est jamais manichéenne, les maltraitants ont des circonstances qui peuvent expliquer certains comportements sans les excuser pour autant (les pages dans lesquelles elle décrit Jean-Christophe et Delphine au plus mal, où l'on sent monter l'acte, le viol dit-pudiquement-domestique, et l'après la honte de l'un, la peur et le dégoût de l'autre, en sont une illustration parfaite. Jean-Christophe reste un pauvre type, un salaud ordinaire, mais la montée en lui de cette pulsion est bien décrite). A chaque fois, je trouve qu'elle est juste, c'en est même énervant, parce qu'elle dit ce que je pense mais elle le dit mieux que moi. Moi qui m'énerve régulièrement ici contre les propos racistes, je me trouve lourdingue parfois, mais Agnès Bihl, avec la même colère est beaucoup plus fine (que voulez-vous je ne suis qu'un pauvre mâle... et puis le talent on l'a ou on ne l'a pas. Agnès Bihl l'a) : "Madeleine avait des envies de meurtre à chaque fois qu'elle croisait ce type, elle n'avait jamais pu s'habituer à ce genre de fumier. C'est dingue. Son Christ est juif, ses chiffres sont arabes et son berger allemand, mais Connard trouvait le moyen d'être raciste quand même." (p. 192)

En plus de toutes ces bonnes raisons de lire ce roman, j'ajouterai que l'auteure a su créer des personnages attachants avec leurs côtés chiants, leurs névroses et leurs difficultés à vivre mais leur volonté de ne pas nuire aux autres surtout à leurs amis et aux amis de leurs amis... Une famille très élargie dont on a envie de faire la connaissance, qui passera des journées à l'Île d'Yeu, qui reste l'une des mes îles préférées (avec Bréhat -mais il m'en manque encore beaucoup à visiter dans l'Atlantique ou la Manche ; si parmi mes lecteurs certains ont de bons plans voire des invitations pour m'en faire découvrir d'autres, n'hésitez pas, contactez-moi)

Bref, un excellent premier roman à l'écriture qui fait mouche. Agnès Bihl est aussi auteure-compositrice-interprète, je m'étais juré d'écouter ses albums après ma lecture de son recueil de nouvelles, je l'ai fait -légalement- sur Internet, point encore en vrai chez moi. Cette fois-ci promis, je le fais.

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7 mai 2015

Fitz, Jonh-Fitzgerald Dumont de son vrai patronyme, n'est pas un inconnu pour vous, puisque je l'ai déjà rencontré et en ai parlé pour Les talons hauts rapprochent les filles du ciel, Les mannequins ne sont pas des filles modèles et Mais je fais quoi du corps. Lors de l'une des trois aventures pré-citées, Fitz avait fait appel à un pirate du net, qu'il a surnommé Bob, pour le sortir d'un mauvais pas. Fitz est donc redevable à Bob, qui entend lui faire payer sa dette dans ce quatrième tome. Fitz traîne toujours dans les boîtes parisiennes pour vendre la petite quantité de drogue qui lui permet de subvenir à ses besoins. Il est toujours proche de Moussah, videur, et Déborah. Mais lorsqu'il doit partir sur cette île accompagné, c'est Jessica son ex avec qui les rapports sont devenus très tendus, notamment parce qu'elle est commissaire de police, qui est choisie pour jouer le rôle de son épouse. Le décor planté, évidemment rien n'est simple, d'abord parce que Fitz n'a rien d'un espion, ensuite parce que les rapports avec Jessica sont difficiles et s'insérer dans un groupe de richissimes hommes d'affaires n'est pas aisé et enfin les mercenaires armés qui surveillent toute l'île ne laissent que très peu de liberté aux invités et n'engagent que peu aux festivités.

J'avais laissé Fitz dans un état plus sombre, plus noir dans le troisième roman de la série et je le retrouve comme avant, plus léger mais aussi plus blasé, désabusé, comme s'il commençait enfin à se poser des questions sur sa vie, qui il faut bien le dire tourne un peu en rond, entre les clubs, les nuits arrosées et les conquêtes d'un soir. Néanmoins, Olivier Gay ne lui a pas ôté son sens de l'humour, son détachement, son dilettantisme, sa maladresse et sa volonté de bien faire. Ni son charme, ni sa tchatche, ni son côté dragueur, séducteur. Tant mieux parce que le mélange fait de ce roman un polar léger avec des personnages fort bien croqués et qui évoluent depuis le début de la série. Fitz tient toujours le premier rôle, mais quasiment à égalité avec Jessica cette fois-ci ; le second rôle du pirate-Bob est une idée formidable qui donne un côté moderne et pour tout dire un rien angoissant puisque Bob entre dans la vie de Fitz quand bon lui semble -peut-être est-il temps de se poser des questions sérieuses sur nos habitudes sur Internet, avec nos portables...

Comme je l'ai dit à propos des autres livres de cette série, Olivier Gay a une écriture très agréable, vive, simple et directe, beaucoup d'humour, de réparties fines et cinglantes, notamment dans les dialogues. Ce quatrième opus est moins une enquête qu'un roman d'espionnage à la manière de James Bond, mais comme il est répété plusieurs fois dedans, Fitz n'a rien de 007. Une bien belle aventure avec des surprises et des révélations jusqu'à la fin. Une série qui monte en puissance puisque je pensais que le précédent était le meilleur mais j'ai pris tellement de plaisir à lire que je révise mon jugement en l'appliquant à ces Trois fourmis en file indienne (explication de ce titre à la Agatha Christie -la galerie de personnages et le huis clos sur l'île peuvent également faire penser à cette auteure- dans le livre) en attendant le prochain...