Ces femmes qui aiment les femmes
EAN13
9782841879083
ISBN
978-2-84187-908-3
Éditeur
Archipel
Date de publication
Collection
POLITIQUE, IDEE
Nombre de pages
364
Dimensions
10 x 10 x 2 cm
Poids
430 g
Langue
français
Code dewey
301
Fiches UNIMARC
S'identifier

Ces femmes qui aiment les femmes

De

Archipel

Politique, Idee

Indisponible

Autre version disponible

Un livre présenté par

Joseph Vebret.

Si vous désirez recevoir notre catalogue et être tenu au courant de nos publications, envoyez vos nom et adresse, en citant ce livre, aux Éditions de l'Archipel,

34, rue des Bourdonnais 75001 Paris.
Et, pour le Canada,
à Édipresse Inc., 945, avenue Beaumont,
Montréal, Québec, H3N 1W3.

eISBN 978-2-8098-1195-7

Copyright © L'Archipel, 2007.

À Catherine, malgré tout, en souvenir de ce qu'elle fut pour moi.

À Joseph, pour tout...

Aux hommes qui pensent que, sans eux, les femmes ne sont rien.

« Qu'elle était belle ma môme opaline
Vue sur une prairie solitaire
Ma belle tendre sculpture androgyne
Tu n'insistas pas pour me plaire

Je ne suis pas de celles qui bondissent
Sur le premier bijou souriant
Du temps il me faut pour que j'agisse
Cœur de mousse modère ses battements. »

Mansfield TYA, « Mon amoureuse ».

« Nous avons créé la fête de l'oubli et
du temps. Nous serrions contre nous les
Thérèse et Isabelle qui s'aimeraient plus
tard avec d'autres prénoms. »

Violette LEDUC, Thérèse et Isabelle.

« I'm not a lesbian. I just loved Thelma. »

Djuna BARNES, à la fin de sa vie.

Avant-propos

« Savez-vous bien, femme étrange,que votre lettre me fait courir des frissons de plaisir... Vous dites que vousm'aimez, que jevousmagnétise, que jevousmets en extase. Vous vous jouez demoi, peut-être ? Mais prenez garde àvous – depuis longtemps, j'ai le désir deme faire aimer passionnément d'unefemme. [...] La femme a tant de puissance dans le cœur, dans l'imagination, tant de ressources dans l'esprit. »

Flora TRISTAN, Lettre à Olympe C.,
1er août 1839.

À chaque Marche des fiertés homosexuelles s'entend la même rengaine, dans la bouche de badauds médusés : « On ne savait pas qu'il y en avait autant ! » Autant de quoi ? Autant de ces hommes et de ces femmes qui se rassemblent, une fois l'an, pour se montrer au grand jour amoureux, militants, festifs et fiers « d'en être ». Fiers de leurs affinités électives, qui les font préférer, malgré les regards désapprobateurs et les railleries de certains, ceux et celles de leur sexe. Ces femmes qui aiment les femmes, qui sont-elles au juste ? Le déictique, s'il les inscrit dans le monde, les montre aussi du doigt. Sont-elles celles que l'on voit déambuler dans les rues, les samedis de la fin du mois de juin, enlacées l'une à l'autre ? Celles qui se cachent, dans le secret de leurs alcôves ? Celles qui, just married, courent rejoindre l'amie de toujours ? Celles qui le lundi couchent avec Pierre, le mardi avec Paul et le mercredi avec Sophie ? Celles qui en rêvent mais n'osent franchir le pas, celles qui le prétendent mais ne l'ont jamais fait ? Toute une constellation d'amantes, réelles comme fantasmées, nébuleuse complexe à appréhender, même doté de la meilleure des longues-vues. À cette cécité et à cet obscurantisme, une seule raison : aimer les femmes quand on est une femme, ça ne se voit pas, ni au front, ni aux plis d'une robe, ni aux pattes d'un pantalon. Ce qui se dit au cœur de certaines est invisible pour les yeux des autres. Ainsi, ces femmes, ce sont celles aussi que l'on a longtemps mises à l'index, oubliées de l'histoire officielle ou confinées aux manuels de tératologie, désignées comme des monstres ou des bêtes de foires. Désormais – autres temps, autres mœurs – ce sont les feuilles de chou et les talk-shows qui se sont emparés du « phénomène ». Ces femmes qui aiment les femmes, c'est tendance, les magazines féminins ou les fanzines underground en font leur marronnier de saison. Celles qui retiennent surtout l'attention, ce sont « les lesbiennes d'un soir », comme s'il n'y avait pas une antinomie à rapprocher une désignation identitaire à une passade d'un jour. Car ces femmes qui aiment les femmes, c'est aussi une communauté, avec son histoire, ses codes, ses valeurs, ses signes de reconnaissance, son way of life, ses luttes et ses idéologies. Une communauté aux visages et aux dégaines multiples et variés, chacune de ses représentantes étant unique en « son genre » : mamans, militantes, célibataires, clubbeuses, femmes d'affaires, fonctionnaires, intermittentes du spectacle, chômeuses, retraitées, de droite ou de gauche, old school ou branchées, Black, blanches, beurettes, cathos, juives, musulmanes, bouddhistes, athées, mélomanes, sportives, contemplatives, Parisiennes, provinciales, d'hier et d'aujourd'hui... Toute une myriade de femmes qui rayonnent au ciel des amours saphiques, et pour autant « dans le monde », celui que la République proclame un et indivisible, avec l'impatience que, bientôt, les droits qui la régissent autorisent leur union et leur permettent de fonder une famille en toute sécurité. Dans leurs revendications, après les années de lutte menées par leurs aînées, ces femmes aspirent avant tout au « droit à l'indifférence », et à jouir de la nouvelle visibilité que leur confèrent les médias ou les séries télévisées, tout en goûtant les plaisirs de l'anonymat. Plus en dedans ou en dehors du placard, mais très loin de lui, mis au rancart à côté de la guillotine.

Il semble bien loin, le temps où aimer une personne de son sexe était un fléau social, rangé à côté de l'alcoolisme ou de la prostitution. La société française, en perpétuel mouvement, s'affiche de plus en plus gay-friendly,à lire les sondages favorables au mariage des couples homosexuels et à voir les devantures de lieux de réjouissance ou de villégiature s'étiqueter aux couleurs du rainbow flag, drapeau arc-en-ciel de la fierté « d'en être ». Preuve d'ouverture en même temps qu'argument commercial, mais aussi signe qui dit, en creux, les violences que subissent encore au quotidien celles qui déclinent leurs amours au féminin, qu'elles en fassent état ou non. Jeudi 14 septembre 2006, en plein centre-ville de Strasbourg où s'affairaient les passants en cette rentrée des classes ensoleillée, deux femmes s'affichant ensemble étaient durement molestées, traitées de « sales putes » et de « sales gouines ». Présentés en comparution immédiate devant le tribunal, leurs agresseurs étaient condamnés à quatre mois de prison, dont un ferme, sans pour autant que le mobile de la lesbophobie ne soit retenu. Si l'amour entre femmes n'est plus un crime, la haine qu'il suscite le reste...

Les icônes lesbiennes d'aujourd'hui ne sont plus celles d'hier : après les courtisanes de l'Ancien Régime, les décadentes de la Belle Époque et les militantes des seventies, on porte aux nues des joueuses de tennis et des pop stars. Tant mieux si, en raison de cette nouvelle donne à l'initiative des médias, la République des Lettres peut couronner de grands prix littéraires des écrivains comme Anne Garréta ou Nina Bouraoui, alors qu'il y a peu de temps encore des femmes comme Renée Vivien ou Violette Leduc frappaient aux portes des éditeurs en vain. Littérature pour autant encore en deçà, selon Laurence, de la réalité de l'amour entre filles : « Je suis lesbienne, profondément lesbienne et, pourtant, je renâcle. Quelle femme osera écrire et proclamer un jour son amour de la chatte, la charnue ou la discrète (peu importe les goûts et les configurations) ? Laquelle osera s'étendre sur le sujet sur plus d'une dizaine de pages sans obligatoirement l'accompagner de petits soupirs et de gémissements destinés à planter un décorum péremptoirement qualifié de féminin ? Quelle femme osera ne pas faire de la déco lorsqu'elle parle du désir d'une femme pour une autre ? »

Le mythe des « deux amies », si rassurant à l'époque où la société voyait dans la procréation sa seule téléologie, a fait son temps. Ces femmes qui aiment les femmes ne sont pas désincarnées ; elles ne font pas que s'aimer, elles couchent ensemble, avec leur bouche, leur langue, leurs mains, leur sexe, leur cul, munies accessoirement d'objets de plaisir... Elles mouillent et jouissent à gorges déployées, n'en déplaise aux psychanalystes...

Quand d'aucuns espéreraient bien mettre les « goudous » et consœurs à « l'égout », ainsi y précipiteraient-ils Marina Tsvetaïeva, Colette, Vita Sackville-West, Virginia Woolf, Susan Sontag, Marguerite Yourcenar, Simone de Beauvoir, Eleanor Roosevelt, Hélène Cixous et Madonna, Amélie Mauresmo et Muriel Robin... mais auss...
S'identifier pour envoyer des commentaires.